dimanche 15 mai 2011

Lignes





Le soleil cuisait, depuis le ciel barbouillé de nuées gazeuses passant vite (de plus lourds frères à l'horizon) et qui en faisaient le plus souvent un trompeur disque pâle. Le sable crissait entre les pages de mon livre, puis la chaleur m'a poussé vers l'eau où d'ailleurs pas mal de gens se trouvaient. Elle était, comme toujours, c'est l'un des sept piliers de la sagesse méridionale, fraîche mais bonne ; j'ai voulu nager jusqu'à la première bouée, une centaine de mètres à vue de nez, à mi-chemin ce fut comme si c'était fait (ce qu'on appelle un trait de caractère) et je me suis allongé sur le dos, les yeux clos par réflexe. Quand je les ai rouverts, un avion allait traverser l'écran troué des nuages continuant à se déplacer rapides et légers, comme à sa rencontre ou l'inverse, pendant que moi-même je dérivais, et le très bref alliage de ces trois mouvements — les nuages et moi en travers des vagues, mus par le même vent (un sujet de fierté), à rebours de l'avion aux fines traces parallèles — ou plutôt la conscience vive que j'en eus et qui passait par mes bras en croix me procura une émotion étrange et somme toute heureuse, je ne savais plus qui allait vers quoi et à quelle vitesse, selon quels angles incalculables — c'était un nœud à peine observable de lignes de fuite comme il y en a tant, partout, tout le temps —, mais tous nous y allions avec une belle détermination, quoique le plus gratuitement du monde.



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