vendredi 9 janvier 2015
Souvenirs de guerre
Je me souviens qu’en 1995 j’étais un lecteur de Charlie, je l’achetais tous les mercredis. J’étais alors objecteur de conscience et j’effectuais mes dix-huit mois à la garderie de Solidarité Enfants Sida. Un soir de Sidaction, j’avais fais partie d’une petite armée de bénévoles assurant le standard téléphonique de Sida Info Service, nous étions peut-être une cinquantaine, je ne sais plus, alignés dans une salle de la mairie de Marseille. J’avais dû essuyer un feu assez nourri d’appels homophobes (sur l’air de “ils l’ont bien cherché”, on en était là), auxquels j’avais bien été forcé de répondre poliment, d’une voix tremblant de rage contenue — une expérience intéressante — ; remonté comme on l’est à vingt ans, j’en avais fait le récit vengeur, et Charlie avait publié mon témoignage. C’était la première fois que je voyais mes mots imprimés quelque part, et j’aime l’idée que ce soit là. Quelques mois plus tard, j’avais participé au dépôt d’une gerbe à la mémoire des déportés homosexuels (activiste par amour, pour être honnête : je sortais à l’époque avec un garçon très militant — le fils d’un Algérien et d’une Normande, alliance redoutable), la cérémonie avait été tendue (les autres gerbes nous lorgnaient d’un sale œil) et rebelote, Charlie avait accueilli mon reportage dans ses colonnes, je m’étais fait l’effet d’un envoyé spécial.
Je me souviens que le premier de ces deux courriers d’un lecteur avait été illustré par Charb… mais hélas je ne souviens pas de son gag. J’ai cherché partout la coupure, je ne la retrouve pas. Elle a disparu.
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Ce sont de très beaux "je me souviens"... que vous n'oublierez jamais et qui résonnent très fort aujourd'hui.
RépondreSupprimerVous ne retrouvez pas la coupure? C'est qu'elle est cicatrisée, sans doute, juste une fine ligne blanche en rappel de ces émouvants souvenirs...
RépondreSupprimerNos yeux de lecteurs ont écrit des souvenirs dans ces pages-là.
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