"Les œuvres de Bernard Werber ont été
traduites en 35 langues. Avec 15 millions d’exemplaires vendus dans le
monde, Bernard Werber est un des auteurs français contemporains les plus lus au
monde (avec Marc Lévy). Il est même considéré comme une star en Corée du Sud."
Wikipédia.
Dans son infinie
générosité, ce grand homme a livré, sur son site
officiel ― ah les hasards du
web-surfing au long des froids dimanches de janvier ! ― la recette de son succès, dans un
texte à se pincer intitulé Quelques conseils aux écrivains en herbe. Ça vaut son pesant de fourmis. En
voici des morceaux choisis ― attention, ça
démarre très fort :
"La blague est l'haïku du roman.
D'ailleurs tout bon roman doit pouvoir se résumer à une blague."
Cela paraît
indépassable et nous pourrions en rester là. Poursuivons cependant :
"Beaucoup de romanciers surtout en
France, font du joli pour le joli. Ils enfilent les phrases tarabiscotées avec
des mots de vocabulaire qu'il faut chercher dans le dictionnaire comme on
enfile des perles pour faire un collier. Cela fait juste un tas de jolis
phrases. Pas un livre. Ils feraient mieux d'être poètes. Au moins c'est plus
clair."
Choisis ton camp,
camarade ! Son triomphe coréen n’étonne plus. Nanard précise :
"Il faut d'abord avoir une bonne
histoire ensuite à l'intérieur on peut aménager des zones décoratives, mais
sans abuser de la patience du lecteur."
Zones décoratives ! J’ai peur qu’on
ne goûte pas assez toute la beauté de cette notion.
"Ne pas hésiter à raconter oralement
votre histoire. Tant pis si vous prenez le risque de vous faire piquer l'idée.
En le racontant oralement, vous sentez tout de suite si cela intéresse et vous
vous obligez à être synthétique et efficace."
(Pas plus tard
qu’hier soir, quelqu’un qu’on me présentait m’a demandé de quoi parlaient mes
livres. Le laborieux et peu engageant bredouillement embarrassé que fut ma
réponse prouva que je n’avais pas retenu, hélas, cette fraîche leçon de Bébert
Werber.)
"Les lecteurs ont souvent des
journées fatigantes, ils lisent pour se détendre, donc il faut penser à ne pas
les ennuyer. Pour cela, alterner les scènes d'actions et de dialogues. Mettre
le maximum de coup de théâtre inattendues [sic au carré]. Ne pas oublier que la lecture est
un plaisir et que l'objectif n'est pas que le lecteur se dise que l'auteur est
doué ; il doit se dire "mais qu'est-ce qui va arriver à la scène
suivante" ?"
Moi je n’oublie
pas que Bernard Werber est né en 1961, et qu’il faut respecter ses aînés. Mais
c’est dur.
"La fonction des livres est aussi
d'apprendre des choses. La forme est un élément, mais si après avoir lu un
livre un lecteur sait quelque chose qui lui permettra de nourrir les
conversations ou les dîners, c'est quand même un intérêt de la lecture."
Ah oui, quand
même. Mais parlons structure à présent :
"Quand vous avez un bon premier jet
brut, essayez de trouver une manière de le découper de l'organiser pour qu'il
soit rangeable dans des chapitres. En général on organise le livre en trois
actes : Début. Milieu. Fin."
(Il faut que
j’arrête de passer des après-midi entiers à lire des conneries sur Internet.)
"Le milieu. Le milieu est
souvent le ventre mou du livre."
(C’est peut-être
le pot-au-feu du soir qui ne passe pas, je suis un peu barbouillé.)
"La fin c'est soit le coup de théâtre
surprise, soit la grande explication de l'histoire cachée, soit l'apothéose."
Ah, voilà, c’est
ça. Bien. Nous avons déjà fait le tour de l’esthétique de B. W. !
Mais son dernier
conseil aux écrivains
en herbe ― vite, une tondeuse ! ― est peut-être le plus beau :
"Si personne n'est prêt à payer pour
votre manuscrit c'est peut être parce qu'il n'est pas bon. Cette hypothèse ne
doit jamais être oubliée. Tout le monde n'a pas forcément de talent. Et ce
n'est pas grave. A la limite tentez la musique."
... !
Ça ne tombe pas dans l’oreille d’un sourd.
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