dimanche 18 mai 2014
Dur comme du fer
« Par sa bonhomie fort naïve, il m’avait toujours paru un véritable enfant de la nature mais maintenant il semblait être tel au sens plus strict du mot et cet homme beau, aimable, heureux de vivre se montrait sous un côté où il devait sembler en fait inquiétant, encore que mon amour pour lui en fût plutôt augmenté. Il nous raconta que juste ce matin quand il voulut se soigner, il sentit une congestion à la tête et qu’il tomba sans connaissance. Il s’était sérieusement blessé avec les débris de verre des ventouses brisées. Déjà au cours de son enfance, il avait effrayé la région quand somnambule il s’était assis au sommet de la tour du château d’Egloffstein. C’est dans cet état qu’un professeur l’avait un jour plongé soudain dans une cuve d’eau froide, raison pour laquelle il était resté plongé huit jours sans connaissance, mais il avait perdu l’habitude de monter sur les toits. Au lieu de cela il s’ensuivit un autre mal encore plus violent, qui l’incite souvent à la moindre excitation à entrer dans une rage à la limite de la folie dans laquelle il n’épargne alors personne et son corps est dur comme du fer. Ainsi, excité par hasard dans son sommeil, aurait-il presque tué son propre frère et une autre fois presque étranglé sa sœur, si l’on n’était pas allé les secourir. C’est aussi en état de sommeil qu’étant enfant il avait assailli avec une telle force l’un de ses professeurs qui était un grand homme robuste et il l’avait frappé si longtemps contre terre que sa jambe s’était cassée. Le lendemain matin, il n’en était nullement conscient. C’est également en état de veille qu’il avait presque précipité dans la mort son ami le plus intime. Ceci, disait-il, le faisait souffrir d’autant plus qu’il n’était capable dans la vie courante d’offenser un enfant et qu’il ne voulait de mal à personne. Il n’osait jamais dormir chez quelqu’un, car il ne pouvait répondre de lui, et bien que les médecins lui eussent recommandé comme meilleure médication de se marier, il ne pouvait s’y résoudre et craignait d’étrangler sa femme dans les huit jours. »
August von Platen, Journaux, mémorandum de ma vie, p. 551-552
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