ONE MAN SHOW
Dans un théâtre de Hollywood
j’ai assisté au one man show de mon pote Mike
Il ne boit plus depuis des années
et son génie de la sitcom lui a valu un Emmy
Hier soir
sa rage contre la vie
l’amertume d’un amour
et d’une paternité
ratés
ont calciné une soixantaine de spectateurs
muets comme la mort
pendant soixante-quinze putains de minutes
de malaise
foutrement pas drôle
En partant comme un con par le mauvais couloir
je me suis retrouvé coincé dans la loge de Mike
lambrissée de formica
sous une unique néon
Mike a désespérément besoin de compliments
sur son solo de divagations
et je ne sais pas ce qui me prend de lui dire la vérité
« Ça ne m’a pas fait rire
ça m’a rendu triste ― je suis désolé »
Et voilà mon Mike
sa gueule ravagée
de cinquante balais
instantanément dégonflée
décomposée
Le voilà réduit au silence
Six secondes plus tard je suis dans le couloir
qui mène au parking
en me disant
bien joué ducon
― dans ta vie à
rallonge d’hurluberlu de débile de mufle
quand comptes-tu apprendre à ne pas dire aux gens
ce que tu penses
et à faire le nécessaire pour ne pas perdre tes amis ?
Une dose d’hypocrisie et une bonne pipe
rien de tel pour envoyer un mec au paradis
à
Los Angeles
Un chat mort puant et pourri
emmuré derrière ton lit
là voilà la vérité
― un conte de fées
d’une pénible
vanité
Dan Fante (b. 1944)
Bons
baisers de la grosse barmaid, poèmes d’extase et d’alcool (2008)
traduction de l’anglais de Patrice Carrer, 13e Note
Éditions.
Le papa a l'air plus puissant que le fiston... du moins pour le souvenir que j'en ai.
RépondreSupprimerje note d'aller vérifier.
merci :-) !
La production de Dan Fante est assez inégale, mais c'est un de ces cabossés attachants. Si mes souvenirs sont bons, j'avais beaucoup aimé "En crachant du haut des buildings" (un roman fortement autobiographique comme tous ses livres). Il a écrit aussi un texte intéressant sur le grand John son père, au titre éloquent : "Dommages collatéraux".
RépondreSupprimerJe note, je note... Merci !
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