dimanche 9 octobre 2011

Whisky, comète et grosses rincées




Armés de trois verres à fond plat, d’une bouteille de whisky vingt ans d’âge et d’une épaisse couverture en laine, mon voisin, mon mec et moi sommes partis hier bille en tête vers les calanques au sud, sur les coups de neuf heures et demie et sur la foi d’un article de web, lu par moi dans une excitation croissante, promettant six centaines d’étoiles filantes à l’heure entre dix et onze heures et précisant que les bords de la Méditerranée, en second choix après le ciel du nord hélas obstrué par des nuages, serait particulièrement propice à leur observation — la prochaine fois serait dans quarante ans, rendez-vous compte mes amis, ce serait trop bête. Le vent pas chaud qui soufflait depuis la veille avait bien dégagé la vue et si la lune brillait beaucoup, dans une tentative assez pathétique d’attirer l’attention, on pouvait tout de même voir pas mal d’étoiles — les fixes, les régulières — au-dessus de la mer déchaînée, aux environs de Saména. L’endroit était désert, il était à peu près 21h53 ; J. a étalé la couverture sur un rocher en pente mais plat, à une vingtaine de mètres du rivage, nous nous sommes allongés et avons attendu cette fameuse pluie de draconides. Pendant un moment, rien. Paul a servi les premiers verres. Pendant un autre moment, toujours rien. Puis soudain, une pluie en effet : celle d’une lourde vague se brisant contre les rochers et que le vent rabattit sur nous sans crier gare. Nous n’avons pu qu’éclater de rire, et nous installer dix mètres plus haut. Enfin nous vîmes de premiers débris de la comète 21P/Giacobini-Zinner. L’eau de mer ne remplace pas avantageusement l’eau de source dans le whisky, j’en réponds. Cependant même ainsi coupé l’alcool nous réchauffait et ce n’était pas superflu. À onze heures nous détalions, lassés de nous les geler et de scruter la voûte en vain ; en fait de pluie d’étoiles, ce n’avait été qu’un lent petit crachin ; le diable si nous en avons surpris une quinzaine. Mais certaines, certes, étaient longues et belles dans le ciel glacé, et nous poussâmes d’enthousiastes cris à chaque fois. Un second paquet d’eau, plus gros que le premier, nous avait encore déplacés de dix mètres, nous étions complètement trempés, grelottant et saouls, c’était bien. De retour à l’immeuble, Paul nous a fait des crêpes au chocolat.


Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire