"Pourquoi, selon moi, Jenkin était-il un amateur ? Vous
pensez qu’il manquait d’humour (je pense au contraire qu’il était souvent
cocasse). Voici le véritable motif : je n’ai jamais ou presque jamais eu sous
les yeux deux pages de son œuvre que je ne puisse résumer en une seule sans
rien leur ôter. Voilà le seul critère que je connaisse en matière d’écriture.
S’il y a quelque part une chose exprimée en deux phrases, et qui aurait pu
l’être en une seule sans rien perdre en clarté, en charme, en puissance, alors
nous avons affaire à un amateur. À cet argument je suis sûr que vous allez
m’opposer Dumas père. Ta ta ta, l’objet d’un récit, c’est de faire traîner les
choses en longueur, de combler les heures ; l’art du conteur, quand il est
aussi écrivain, consiste à délayer en faisant preuve d’invention continuelle —
historique et technique — mais sans en avoir l’air ; de faire au contraire en
sorte d’user de cette même faculté de condenser, en privilégiant le présupposé
et l’évidence, qui est le propre de l’art d’écrire. C’est cela le point faible de
mes histoires : je ne leur laisse que la peau sur les os.
Je me lèverais
d’entre les morts à seule fin de prêcher cela !
"
R. L.
Stevenson à William Archer, Lac Saranac, février 1888
"Quels plaisirs peut-on comparer à ceux du virtuose dépourvu
de virtuosité ?"
Le même à Charles Baxter, le 7 mars 1890
Le même à Charles Baxter, le 7 mars 1890
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