En quelque point obscur d’une terre inconnue
« O nuit majestueuse ! comme ta splendeur s’est encore agrandie devant nos yeux depuis que nous avons entrevu la vie sous ta mort apparente ! comme tes harmonies sont devenues délicieuses ! comme ton spectacle s’est transfiguré devant nos âmes ! Jadis, je me plaisais à vous contempler dans le silence de minuit, ô Pléiades lointaines dont la clarté diffuse nous emporte si loin de la Terre ! je me plaisais à voir reposer sur vous l’essaim de mes pensées, parce que vous êtes une station brillante dans l’infini des cieux. Mais aujourd’hui que je vois dans votre multiple rayonnement autant de foyers où des familles humaines sont rassemblées ; aujourd’hui que dans ce rayonnement si calme je crois reconnaître les regards de frères inconnus, le regard peut-être des êtres chéris que j’aimais tant, et que la Mort inexorable a emportés loin de moi, de cet être, surtout, qui s’est envolé avec un sourire sur les lèvres pour ne point me laisser deviner ses souffrances, et qui maintenant est là, rêvant peut-être aussi en quelque point obscur d’une terre inconnue, se ressouvenant avec une tristesse inexplicable de nos amours brisées, et cherchant comme moi des regards égarés dans le ciel… Oh ! […] »
Camille Flammarion, La Pluralité des Mondes Habités (1862)
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