(Thanksgiving Day Parade, NYC, 1937)
"En réponse à tout cela je déclarai que je ne mentirais plus dorénavant.
Je tins cette promesse. Elle est à l'origine d'une période de terreur, qui n'eut de bon que sa durée très brève. Je m'en tenais à mon principe de ne jamais mentir : ni dans mes discours ni dans mes sentiments, et — bien entendu — d'éviter aussi, tel un mensonge, de me taire. Un Américain a, paraît-il, établi un record dans cet exercice en le pratiquant une semaine durant. Moi, j'ai tenu environ dix semaines. Je disais tout ce que je pensais être vrai — songez à ce que cela signifie chez un jeune homme en pleine crise de puberté ! Ce fut une catastrophe. On nous avait interdit toute relation. Mais lorsque l'école reprit, la situation devint impossible. J'étais continuellement en guerre avec les maîtres et les camarades, parce que je disais une foule de choses que personne n'avait envie d'entendre ; c'était un amour de la vérité exagéré, dément, qui était collé comme une étiquette sur toutes mes paroles. Être absolument véridique revient à annihiler l'existence en la morcelant. Mon père était convaincu que j'avais cessé d'être normal et qu'il fallait m'interner. Il alla voir notre médecin de famille et lui demanda de m'observer.
Puis vint le jour où, en tant qu'être normal que je n'avais cessé d'être pendant tout ce temps, je me rendis compte de l'impossibilité de ce comportement. J'abdiquai, et jetai du même coup par-dessus bord toute ma religion chrétienne."
Walter Muschg, Entretiens avec Hans Henny Jahnn, 1933
(Corti, 1995, p. 91-92)
La vérité? Plus je vieillis et moins je sais ce que c'est... M.F.
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